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La démocratie associative ?

Perspectives historiques


La Ligue de l’enseignement, après la Première Guerre, réduite à ses instances dirigeantes, se heurte aux fédérations départementales d’œuvres postscolaires laïques qui se (re)structurent de façon autonome et souhaitent créer leur propre organisme national. (extrait de : Mutation démocratique à la Ligue (1925-1940).


ÉDITORIAL

 

La démocratie associative ? Perspectives historiques

 

DÉBATS

 

Mutation démocratique à la Ligue (1925-1940)

Nathalie Sévilla, docteur en histoire de l’IEP de Paris, maître de conférences à l’IUFM de Lorraine.

La Ligue de l’enseignement, après la Première Guerre, réduite à ses instances dirigeantes, se heurte aux fédérations départementales d’œuvres postscolaires laïques qui se (re)structurent de façon autonome et souhaitent créer leur propre organisme national. L’organisation reconnaît ces dernières comme structures décisionnelles et devient une confédération (1925). La forme fédérative permet au monde primaire militant, bien que canalisé, d’avoir un poids significatif dans les orientations de l’organisation, qui devient un des lieux de négociation entre l’Administration de l’Éducation nationale et le Syndicat national des instituteurs. La Ligue confédérale doit cependant veiller à ce que la démocratisation de ces mécanismes de décision n’engendre aucune inféodation.

Jeune Alsace, école de la nation (1944-1947)

Julien Fuchs, maître de conférences, UFR sport et éducation physique – université de Bretagne occidentale.

Dans l’Alsace de l’après-guerre, la volonté de participer à la réintégration culturelle des populations dans la nation française caractérise la relance des associations de jeunesse. L’ambition, presque unanimement partagée, est de faire de ces associations des « écoles de la nation ». Nous cherchons alors à voir en quoi celles-ci constituent, dans le contexte de la Libération, des lieux privilégiés d’apprentissage de comportements, de manières de penser et de valeurs perçus comme propres à la nation française. En d’autres termes, nous montrons que ces associations, qui se veulent espaces de formation de la citoyenneté, peuvent être des maillons de l’intégration républicaine.

Les MJC, bourses du travail des associations

Laurent Besse, docteur en histoire de l’université de Paris-I, enseignant dans le secondaire, chercheur associé au Centre d’histoire sociale du XXe siècle (Paris-I).

De la Libération au tournant des années 1980, les MJC – associations loi 1901 – ont prétendu exercer un rôle d’accueil et de concertation pour les autres associations, sur le modèle des bourses du travail. Favorisées par leur caractère semi-institutionnel, elles ont participé à la rationalisation de la vie associative dans les villes moyennes et le monde rural. Elles se sont largement ouvertes aux autres associations et, à ce titre, ont parfois revendiqué le rôle de « contre-pouvoir associatif » après Mai 68. Mais, à la fin des années 1970, elles n’étaient plus en mesure d’ambitionner le rôle de « bourses du travail du monde associatif » : victimes de leur banalisation et de l’institutionnalisation des politiques culturelles locales, elles comptaient désormais seulement comme des associations parmi d’autres.

Démocratisation au Secours populaire français

Axelle Brodiez, docteur en histoire de l’université de Paris-VIII, post-doctorante CNRS au LAHRA (Lyon).

Ex-organisation de masse communiste devenue grande association humanitaire, le Secours populaire français a opéré depuis le milieu des années 1950 un aggiornamento passant par la démocratisation interne, gage de son émancipation du PCF et de sa nouvelle fonction démocratique dans l’espace public (« aiguillon des pouvoirs publics » et réinvention d’une « fonction tribunitienne », via un rapport ambivalent au politique). Le prisme monographique permet cependant de pointer la persistance d’héritages qui, bien que pour certains spécifiques, n’en renvoient pas moins à des caractéristiques plus générales du monde associatif.

Division politique du travail dans l’animation

Francis Lebon, sociologue, chargé de cours à l’université de Paris-XII.

Concernant les centres de loisirs, les deux principales associations implantées dans le département du Val-de-Marne, en région parisienne, sont les Francas et la Ligue de l’enseignement. Ces fédérations de filiation « laïque » ont des rapports privilégiés avec les municipalités de gauche, même si elles sont peu présentes sur le marché de la formation (dominé par l’UFCV et les CEMEA) et l’organisation des centres de loisirs (généralement municipale). Quels sont les liens de ces associations avec le pouvoir politique municipal ? La Ligue de l’enseignement organise les centres de loisirs de villes dirigées par le parti socialiste tandis que les Francas forment des animateurs, en particulier dans des communes conduites par le parti communiste.

De la démocratie dans les associations culturelles

Pierre Mayol, ministère de la Culture et de la Communication, DDAI – DEPS.

Le ministère de la Culture publia en 2001 un dossier pour célébrer la loi de 1901 sur les associations. Il montrait l’importance et la fragilité des associations dans la culture et les arts. Présenter cette publication aujourd’hui, c’est montrer que ces difficultés persistent. La réalité est plus rugueuse que les discours généreux : les coupes budgétaires menacent les 157 000 (sur 880 000) associations concernées. Les associations « faux nez » créées par le ministère pour raisons comptables sont l’arbre qui cache une forêt dévastée dont on connaît la vigueur interne, mais mal les sentiers et le périmètre. Cette synthèse présente des articles inspirés par le droit, l’économie, la statistique et la politique, qui rejoignent l’approche plus historique publiée ici pour Agora débats/jeunesse.

 

POINTS DE VUE

 

Culture politique des jeunes Allemands

Wolfgang Gaiser, Martina Gille, Johann de Rijke, Sabine Sardei-Biermann, chercheurs au Deutsches Jugendinstitut (Institut allemand de la jeunesse).

Les auteurs constatent un rapprochement des attitudes politiques des jeunes Allemands des anciens et nouveaux Länder qui n’efface pas des différences de culture politique entre l’Ouest et l’Est. Examinant l’intérêt des jeunes pour la politique, leurs opinions sur les régimes, les institutions et les acteurs politiques, ils notent la spécificité des opinions des jeunes peu instruits, témoignant d’une influence des inégalités sociales. Ils nomment « démocrates critiques » les jeunes alliant une insatisfaction envers le fonctionnement de la démocratie à une forte compétence politique et à une volonté d’agir pour améliorer ce système politique.

Construction sociale d’une jeunesse en difficulté

Catherine Tourrilhes, IRTS de Champagne-Ardenne – équipe de recherche PROFEOR Lille-III, cadre pédagogique à l’IRTS de Champagne-Ardenne, responsable de l’unité d’enseignement « médiation sociale », licence professionnelle « médiation par le sport » UFR STAPS Reims.

La jeunesse en difficulté apparaît comme une construction sociale faite au fur et à mesure des difficultés rencontrées par les institutions sociales et éducatives mais aussi dans le cadre des dispositifs d’insertion dans le monde ordinaire du travail censés n’être que provisoires. Dans son individualisation, l’insertion déclare le jeune acteur et responsable unique de son propre projet, renforçant ainsi l’intériorisation de son échec et disqualifiant le travail social dans sa fonction d’assistance. Galère et carrières déviantes se construisent alors en rupture avec les intervenants sociaux, même si paradoxalement on peut observer, chez certains jeunes, une capacité de mobilisation et d’action collective pour affirmer leur identité sociale et culturelle.

 

CHRONIQUES

 

LIRE, FAIRE LIRE

Comptes rendus de lecture

Qu’est-ce qu’une société ethnique ? Ethnicité et racisme dans les sociétés européennes d’immigration, Albert Bastenier

Cultures lycéennes : la tyrannie de la majorité, Dominique Pasquier

L’adolescent est une personne, Michel Fize

Savoir, apprendre, transmettre : une approche psychanalytique du rapport au savoir, Françoise Hatchuel

L’animation des territoires : les villages de vacances du tourisme social, Luc Greffier

Notes de lecture