À 13 ou 14 ans, un peu plus d’un tiers des collégiens sont partis aux vacances de la Toussaint ou à celles de Noël 2018, et quatre élèves sur dix à celles d’hiver 2019. Ces départs, et tout particulièrement ceux avec les parents, sont d’autant plus fréquents que la famille de l’élève est aisée et diplômée. Ce lien avec le milieu social se retrouve pour la fréquentation des stages et des séjours sportifs. Les séjours au sein de la famille ou chez des copains, moins dépendants des congés et des ressources financières des parents, apparaissent cependant moins liés au milieu social.
À 13 ou 14 ans, un peu plus d’un tiers des collégiens sont partis aux vacances de la Toussaint ou à celles de Noël 2018, et quatre élèves sur dix à celles d’hiver 2019. Ces départs, et tout particulièrement ceux avec les parents, sont d’autant plus fréquents que la famille de l’élève est aisée et diplômée. Ce lien avec le milieu social se retrouve pour la fréquentation des stages et des séjours sportifs. Les séjours au sein de la famille ou chez des copains, moins dépendants des congés et des ressources financières des parents, apparaissent cependant moins liés au milieu social.
Comment les collégiens occupent-ils les petites vacances ? Qui sont ceux qui ne partent pas et ceux qui partent ? Avec qui ces derniers partent-ils ? Ont-ils recours aux séjours collectifs ? L’enquête sur les activités des jeunes en dehors du collège (AJEC), réalisée par l’INJEP et la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) sur un échantillon de 12 000 collégiens [encadré « Source »], permet de répondre à ces questions. La manière dont les élèves occupent les petites vacances s’accompagne de fortes disparités sociales : les départs notamment, et tout particulièrement les séjours avec les parents, apparaissent très liés au milieu social et au niveau de revenu et de diplôme des familles.
SOURCE
Une enquête sur les activités des jeunes en dehors du collège auprès de 14 632 élèves
L’enquête sur les activités des jeunes en dehors du collège (AJEC) a été réalisée par l’INJEP et la DEPP qui ont interrogé 14 632 élèves, d’avril à août 2019, sur leurs activités dans quatre domaines : le sport, l’engagement associatif, les vacances et le travail scolaire à la maison. 13 179 des collégiens interrogés ont répondu à l’enquête en fournissant une réponse exploitable, ce qui porte le taux de réponse à 90,1 %. Cette enquête s’insère dans le dispositif du panel d’élèves recrutés au cours préparatoire en 2011 et suivis depuis cette date par la DEPP. Au moment où ils ont été interrogés, les collégiens avaient de 13 à 14 ans et étaient pour la plupart en classe de quatrième. Seuls les répondants dont les parents avaient répondu à l’enquête Famille de 2012 du panel 2011 ont été retenus dans la population d’intérêt, soit 12 258 élèves. Une pondération a été calculée pour que ces jeunes soient représentatifs de l’ensemble des élèves entrés pour la première fois au cours préparatoire en septembre 2011. Les petites vacances scolaires étudiées ici sont celles de la Toussaint 2018, de Noël 2018 et d’hiver 2019. En effet, la collecte ayant commencé début avril, il n’a pas été possible d’étendre l’interrogation aux vacances de Pâques : en raison des zones de vacances, les jeunes de l’échantillon ne les avaient pas tous vécues au moment où ils ont été interrogés. Les questions sur les activités concernent l’ensemble des vacances ; un jeune peut donc être parti selon plusieurs modalités d’autant plus que chaque période de petites vacances dure deux semaines et que 35 % des jeunes étaient partis à plusieurs d’entre elles.
La question de l’occupation du temps pendant les petites vacances est particulièrement importante dans le contexte français d’un calendrier scolaire structuré par une alternance entre sept semaines de cours et deux semaines de vacances. Cette situation singularise notre pays par rapport aux autres pays européens où, en dehors de celles de Noël, les petites vacances sont généralement réduites à quelques jours [1]. Au total, les collégiens français sont en petites vacances scolaires pendant huit semaines, avec une offre de centres de loisirs nettement plus faible que celle existant dans l’enseignement primaire [2].
À 13 ou 14 ans, les collégiens partent nettement moins souvent aux vacances de la Toussaint, de Noël ou de février qu’aux grandes vacances. En retenant la définition des vacances de l’Organisation mondiale du tourisme1, 87 % des jeunes partent au moins quatre jours lors des vacances d’été, alors qu’un peu plus d’un tiers des collégiens seulement sont partis aux vacances de la Toussaint ou à celles de Noël 2018, et quatre jeunes sur dix à celles d’hiver 2019 [tableau 2, en ligne sur www.injep.fr, rubriques « Publications »]. Au total, 59 % des collégiens sont partis au moins une fois à l’une d’entre elles. Partir à chaque période de petites vacances est beaucoup plus rare : seulement 18 % des élèves sont dans une telle situation.
Parmi les collégiens, les départs aux petites vacances scolaires gardent une forte connotation familiale : 71 % des élèves qui sont partis ont voyagé au moins une fois avec leurs parents et 45 % ont rendu visite au moins une fois à de la famille [tableau 3]. Les séjours chez les copains ont rassemblé un peu plus du tiers des partants.
Que ce soit à proximité de chez eux ou à l’occasion d’un départ, un peu plus d’un collégien sur cinq participe à un stage ou à un séjour collectif lors d’une des trois petites vacances. À un âge où le sport occupe une place prépondérante dans les loisirs [3], la thématique des stages et séjours collectifs reflète largement cette tendance : près des deux tiers d’entre eux – réunissant 14 % des jeunes – sont consacrés au sport [tableau 4]. Les séjours linguistiques (5 %) et les stages et ateliers artistiques (4 %) apparaissent nettement moins mobilisateurs. Les colonies de vacances accueillent une part comparable d’élèves (5 %), sachant que l’offre de colonies de vacances est moins dense lors des petites vacances que lors des vacances d’été [2]. Parallèlement, les jeunes peuvent fréquenter les maisons de jeunes et de la culture (MJC) ou les structures d’animation mises en place par les fédérations d’éducation populaire et les centres d’accueil municipaux2 : 7 % d’entre eux déclarent y être allé.
Les départs aux petites vacances scolaires varient fortement avec le milieu social : 79 % des enfants de cadres et de chefs d’entreprise sont partis au moins une fois au cours de celles de la Toussaint, de Noël 2018 ou d’hiver 2019, contre moins de la moitié des enfants d’ouvriers ou d’inactifs [graphique]. Quand ils partent, les enfants de cadres et de chefs d’entreprise partent aussi plus souvent avec leurs parents que les autres élèves (87 % contre à peine plus d’un enfant d’ouvriers non qualifiés ou d’inactifs sur deux [tableau 3]). Rapporter les séjours avec les parents à l’ensemble des jeunes – et pas seulement aux seuls partants – permet de prendre la pleine mesure de ces inégalités. Ainsi, si les deux tiers des enfants de cadres et de chefs d’entreprise partent avec leurs parents, ce n’est le cas que de moins d’un enfant de professions intermédiaires ou d’artisans commerçants sur deux, de seulement un tiers des enfants d’employés et du quart des enfants d’ouvriers ou d’inactifs [graphique].
Ces disparités sociales semblent recouvrir à la fois des différences de revenu et de capital scolaire. En effet, les départs et les séjours avec les parents sont d’autant plus fréquents que la famille bénéficie de ressources financières et d’un capital scolaire élevés. Ainsi, la fréquence des départs stagne entre 44 % et 47 % quand les parents disposent d’un revenu mensuel inférieur à 2 000 € et augmente ensuite fortement au fur et à mesure que les ressources de la famille s’accroissent pour atteindre 84 % lorsque la famille bénéficie de 6 000 € ou plus de revenu par mois [tableau 2].
Milieu social, niveau de revenu et de diplôme de la famille étant liés entre eux, des analyses toutes choses égales par ailleurs ont été mises en œuvre pour estimer le rôle exact de chacune de ces caractéristiques. Leurs résultats mettent en évidence le rôle prépondérant du niveau de revenu. À autres caractéristiques comparables, 22 points séparent encore les chances de départ des jeunes dont la famille bénéficie d’un revenu mensuel égal ou supérieur à 6 000 € de celles des collégiens dont les parents disposent de moins de 1 200 € [tableau 1]. Les premiers ont aussi une probabilité de séjour avec leurs parents beaucoup plus élevée que les seconds : 18 points les séparent toutes choses égales par ailleurs [tableau 5].
Toutefois, à niveau de revenu et autres caractéristiques comparables, les collégiens vivant dans une famille dont au moins un des parents est diplômé de l’enseignement supérieur ont des chances de départ plus élevées de 9 points que les autres élèves, ces inégalités étant encore plus marquées pour les séjours avec les parents. Par ailleurs, à niveau de revenu donné, les enfants de cadres ou de chefs d’entreprise gardent une probabilité de départ ou de séjour avec leurs parents supérieure de 14 points de celle des enfants d’inactifs. Le maintien de tels écarts peut refléter le fait que les personnes exerçant les professions les plus qualifiées sont aussi souvent celles qui ont le plus de jours de congé (aménagement et réduction du temps de travail – ARTT –, jours de récupération…) et peut-être davantage de latitude pour fixer leurs dates de congés pendant les petites vacances scolaires [4]. Les élèves dont au moins un des parents est enseignant illustrent cette situation : à autres caractéristiques comparables, la probabilité de départ des enfants d’enseignants est supérieure de 8 points à celle des autres enfants [tableau 1, en ligne].
Sans doute parce qu’ils sont moins dépendants des congés et des ressources financières des parents, les séjours au sein de la famille ou chez des copains apparaissent moins liés au milieu social. Toutefois, l’accès aux stages et aux séjours linguistiques et sportifs est très inégal selon l’origine sociale : les enfants de cadres et de chefs d’entreprise sont respectivement deux fois et trois plus nombreux que ceux d’inactifs à en bénéficier [tableau 4].
Ces disparités sociales s’expliquent d’abord par des différences de niveaux de revenu et de diplôme des parents. En effet, les jeunes vivant dans une famille bénéficiant d’un revenu mensuel de 4 000 € ou plus gardent, à autres caractéristiques comparables, une probabilité de participer à un séjour sportif supérieure de 5 points à celle des autres élèves [tableau 6]. Le niveau de revenu joue différemment pour la fréquentation des MJC et des autres structures d’accueil : c’est parmi les élèves dont les parents gagnent entre 1 200 et 3 000 € par mois que ces structures rencontrent le plus de succès. Par ailleurs, la probabilité que l’élève fasse un stage ou un séjour sportif ou linguistique s’accroît respectivement de 6 et de 2 points quand ses parents sont diplômés de l’enseignement supérieur, comme si les familles les plus dotées en capital scolaire étaient aussi les plus soucieuses de donner un contenu éducatif aux activités de vacances.
La fréquence de départ n’est pas indépendante de la composition de la famille. D’une part, les collégiens en garde alternée ou vivant dans une famille monoparentale ou recomposée ont, toutes choses égales par ailleurs, une probabilité de départ de 4 à 6 points supérieure à celle des jeunes vivant avec leurs deux parents [tableau 1]. Les parents séparés se répartissent en effet souvent la prise en charge de leur enfant pendant les différentes vacances scolaires, ce qui accroît d’autant les opportunités de partir. En revanche, l’appartenance à une famille nombreuse pèse négativement sur les départs : seulement la moitié des collégiens appartenant à une fratrie de quatre enfants ou plus sont partis au moins une fois lors des petites vacances ; à revenu et autres caractéristiques comparables, ils gardent une probabilité de départ inférieure de 4 à 5 points à celle des autres élèves [tableau 1] et ils partent moins souvent avec leurs parents.
Contrairement à ce que l’on observe pour les vacances d’été, les descendants d’immigrés, à l’exception de ceux dont les parents sont issus d’un pays d’Europe, partent moins fréquemment aux petites vacances que les autres jeunes : 48 % d’entre eux partagent cette situation contre 61 % des collégiens sans ascendance migratoire sur dix. Cette différence s’explique en grande partie par le fait que les revenus des familles immigrées sont en moyenne inférieurs à ceux des autres parents [5]. En effet, à revenu et autres caractéristiques comparables, les écarts se réduisent nettement, même si les descendants d’immigrés originaires d’Asie et de Turquie gardent une probabilité de départ de 12 et 10 points inférieure à celle des jeunes sans ascendance migratoire, cet écart atteignant 3 points pour les descendants d’immigrés originaires du Maghreb [tableau 1].
Quand ils partent, les descendants d’immigrés se distinguent des autres élèves par des séjours chez un copain nettement moins fréquents [tableaux 3 et 5]. Ces moindres départs chez un copain peuvent être reliés aux ségrégations sociales d’habitat et d’établissement scolaire auxquelles les descendants d’immigrés sont plus exposés que les autres élèves [6] et qui leur donnent sans doute moins l’opportunité d’avoir des amis susceptibles de les inviter à partir avec eux. De fait, la scolarisation en REP + ou en REP3 est toutes choses égales par ailleurs associée à une moindre probabilité de partir chez un copain. Toutefois, la prise en compte de cette variable dans l’analyse ne réduit pas sensiblement les écarts entre les descendants d’immigrés et les autres élèves, qui relèvent donc aussi d’autres facteurs.
Si les filles partent un peu plus souvent que les garçons (60 % contre 57 %), c’est surtout sur les modalités de départ qu’elles se distinguent : quand elles partent, 41 % d’entre elles séjournent chez un copain ou une copine contre seulement 29 % des garçons [tableau 3]. Cet avantage en faveur des filles – confirmé toutes choses égales par ailleurs – se retrouve pour les départs dans de la famille (48 % contre 41 %). Les données collectées dans le panel 2011 ne suggèrent pas que cette situation pourrait être liée à une sociabilité plus forte des filles.
Si aucune différence significative entre filles et garçons n’apparaît pour les séjours avec les parents, en revanche, le rapport entre les deux groupes d’élèves s’inverse pour les stages et séjours collectifs : à autres caractéristiques comparables, les filles ont une probabilité moins élevée que les garçons de participer à un stage ou à un séjour sportif, de fréquenter une MJC ou un autre point d’accueil des jeunes ou encore de partir en colonie de vacances [tableau 6].
1. L’Organisation mondiale du tourisme considère comme des vacances les déplacements d’agrément comportant au moins quatre nuits consécutives en dehors du domicile.
2. Pour simplifier la rédaction, ces différentes structures d’accueil seront désignées dans la suite du texte sous l’expression « autres structures d’accueil ».
3. Les collèges classés en REP (réseau d’éducation prioritaire) et en REP + (réseau d’éducation prioritaire renforcé) accueillent les élèves des quartiers connaissant les plus grandes concentrations de difficultés sociales et scolaires.
Atlas national des fédérations sportives 2019 Hors collection
Jeunes, religions et spiritualités Agora débats / jeunesses
Jeunes et santé mentale : ressources et appropriations Agora débats / jeunesses
Les études… et à côté ? Les modes de vie des étudiant·e·s Agora débats / jeunesses