L’(in)employabilité des jeunes « invisibles »

Ce rapport de recherche propose une analyse sociologique des représentations sur la jeunesse des acteurs impliqués dans un dispositif de retour à l’emploi.

À partir de 28 entretiens ethnographiques menés auprès des concepteurs (dirigeants, présidents, cadres opérationnels) et professionnels (conseillers en insertion, assistants sociaux, psychologues), les auteurs et autrices montrent que les représentations sur les jeunes et les pratiques d’accompagnement diffèrent selon les organisations (1), lesprofils de jeunes pris en charge (2), et la trajectoire sociale et professionnelle des professionnels enquêtés (3).

Les deux organisations à l’origine de la création du dispositif possèdent des représentations différentes des jeunes et ne souhaitent pas prendre en charge des catégories de jeunes similaires. Les professionnels présentent par ailleurs des stéréotypes négatifs à l’égard des jeunes issus de milieux défavorisés, et valorisent au contraire les jeunes issus des classes moyennes et supérieures. Ils visent à outiller les jeunes à l’utilisation de techniques et outils facilitant leur recherche d’emploi, quitte à leur demander de modifier leur apparence physique pour correspondre aux attentes qu’ils supposent chez les employeurs, ce qui peut conduire dans certains cas à légitimer des pratiques discriminatoires.

Les professionnels enquêtés ne partagent pas tous les mêmes représentations. Leurs expériences antérieures avec les « jeunes » mais aussi leurs trajectoires sociale, scolaire et professionnelle influencent leurs représentations et pratiques professionnelles, confirmant ainsi les travaux déjà menés sur les profils des conseillers en insertion professionnelle. Ayant mis en avant l’existence de stéréotypes, le rapport propose une série de préconisations afin de lutter contre les discriminations à différentes échelles du dispositif : conception, recrutement, formation des agents, travail de repérage et de suivi des jeunes.