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Quelles sont les missions de Service Civique qui favorisent l’engagement bénévole ?


L’intensité de l’engagement bénévole des volontaires de Service Civique diffère selon leurs profils et selon le type de mission effectué. Si les volontaires de Service Civique sont en moyenne un peu plus souvent bénévoles que les jeunes d’âge comparable, tant avant qu’après la mission, les degrés d’engagement varient selon le niveau de diplôme, le statut d’activité et le genre. Près de la moitié des volontaires déclarent que leur mission a eu une influence positive sur leur envie de faire du bénévolat, mais les fréquences auxquelles les volontaires font du bénévolat ne sont en moyenne pas plus élevées après la mission qu’avant. Les missions réalisées dans les associations favorisent plus l’engagement bénévole que celles effectuées dans le secteur public.


Quelles sont les missions de Service Civique qui favorisent l’engagement bénévole ?

L’intensité de l’engagement bénévole des volontaires de Service Civique diffère selon leurs profils et selon le type de mission effectué. Si les volontaires de Service Civique sont en moyenne un peu plus souvent bénévoles que les jeunes d’âge comparable, tant avant qu’après la mission, les degrés d’engagement varient selon le niveau de diplôme, le statut d’activité et le genre. Près de la moitié des volontaires déclarent que leur mission a eu une influence positive sur leur envie de faire du bénévolat, mais les fréquences auxquelles les volontaires font du bénévolat ne sont en moyenne pas plus élevées après la mission qu’avant. Les missions réalisées dans les associations favorisent plus l’engagement bénévole que celles effectuées dans le secteur public.

Après une publication sur les parcours scolaires et professionnels des volontaires de Service Civique (Francou et Ploux-Chillès, 2020), l’INJEP et l’Agence du Service Civique se sont intéressés aux parcours d’engagement bénévole de ces jeunes et à la place de leur mission dans ces parcours. L’enquête auprès des bénéficiaires du Service Civique, menée en 2019 en partenariat entre l’INJEP et l’ASC, décrit le temps passé à faire du bénévolat par les jeunes avant et après leur mission. Il ressort que les volontaires 1 sont en moyenne un peu plus souvent engagés bénévolement que l’ensemble des jeunes, tant avant qu’après leur mission, et que les jeunes engagés avant leur mission ont un profil similaire aux jeunes bénévoles au niveau national : ce sont plus souvent des diplômés, des étudiants, et des hommes (Baromètre DJEPVA sur la jeunesse, 2018).

Si une part importante des volontaires estime que leur mission a eu une influence positive sur leur envie de faire du bénévolat (44 %), ils ne sont que 14 % à accroître de façon importante le temps consacré au bénévolat après leur mission et 17 % l’ont diminué. Quel que soit le profil des jeunes, les missions effectuées dans le secteur associatif 2 sont les plus susceptibles d’augmenter par la suite la fréquence de l’engagement bénévole. Ceux ayant eu le sentiment de réaliser des actions utiles aux autres se sont davantage investis ensuite dans différentes formes d’engagement bénévole. La qualité de l’encadrement des jeunes pendant leur mission joue également un rôle positif.

Avant leur mission : des volontaires un peu plus souvent bénévoles que la moyenne

Parmi les anciens volontaires, 42 % ont donné du temps bénévolement dans l’année qui a précédé leur mission de Service Civique, ce qui est légèrement supérieur à la proportion observée sur la population des 18-25 ans 3 (36 %). Les bénévoles qui donnent du temps toutes les semaines sont notamment surreprésentés parmi les volontaires (20 % contre 15 %).

Les volontaires qui étaient engagés bénévolement avant leur mission de Service Civique sont plus souvent diplômés, plus souvent des personnes qui étudiaient jusqu’à récemment ou pendant leur mission, et plus souvent des hommes. Ainsi, les volontaires diplômés du supérieur avant leur mission étaient 51 % à être déjà engagés bénévolement, contre 40 % des volontaires dont le plus haut diplôme était un baccalauréat, et 26 % pour les CAP ou BEP. Les volontaires qui étaient étudiants pendant leur mission étaient 57 % à être engagés, tandis que ceux sortis du système scolaire une année avant leur mission étaient 35 % dans ce cas. Les hommes sont un peu plus souvent engagés dans des actions bénévoles que les femmes (47 % contre 39 %), alors que les femmes représentent 59 % des volontaires du Service Civique. Ces caractéristiques des volontaires engagés avant leur mission sont ainsi très similaires à celles de l’ensemble des jeunes engagés de 18 à 25 ans (Baromètre DJEPVA, 2018), parmi lesquelles on trouve également une surreprésentation des personnes diplômées, en études, et des hommes. Les niveaux de diplômes des volontaires expliquent d’ailleurs en partie le fait qu’ils sont plus engagés dans le bénévolat. Alors que les diplômés d’un CAP ou BEP sont plutôt moins engagés que la moyenne des 18-25 ans (29 %), ces filières professionnelles sont moins courantes parmi les volontaires : 7 %, contre 16 % parmi les 18-24 ans 4. Comme pour l’ensemble des jeunes Français, les volontaires résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) sont moins engagés que les autres. La taille de la commune d’origine (urbaine ou rurale) n’a pas d’influence sur le degré d’engagement. Par ailleurs, les jeunes volontaires qui déclarent que leurs parents ont une participation bénévole régulière ont plus de chances d’être eux-mêmes engagés, et cela même en tenant compte de l’effet des autres variables jouant sur le bénévolat.

Les volontaires anciennement bénévoles plus souvent dans les associations, moins dans les services publics et assimilés

Ces différents degrés d’engagement bénévole parmi les volontaires ont une influence sur les types de missions effectués par les volontaires, à la fois dans les types d’organismes et les domaines des missions. Les associations sportives sont notamment celles qui accueillent le plus de volontaires déjà bénévoles (68 %) [tableau 1]. Les associations non sportives en accueillent aussi plus que la moyenne (49 %), tandis que les établissements d’aide à l’insertion ou à l’orientation, les établissements de santé, et les administrations de l’État en accueillent beaucoup moins (resp. 26 %, 28 % et 29 %).

Les canaux de recrutement des différents types d’organismes peuvent en partie expliquer ces différences : parmi les volontaires qui déclarent s’être orientés vers un Service Civique parce qu’un organisme leur a directement proposé une mission (18 % de l’ensemble), 60 % étaient engagés bénévolement avant leur mission contre 42 % en moyenne. Les volontaires directement orientés par un organisme sont par ailleurs surreprésentés dans les associations sportives (52 %), et dans une moindre mesure dans les associations non sportives (17 %), que dans la moyenne de toutes les autres catégories d’organismes (10 %). À l’inverse, les volontaires qui ont été orientés vers le Service Civique par un organisme chargé de l’orientation ou de l’insertion (mission locale, réseau information jeunesse, Pôle Emploi, établissement scolaire…) ne sont que 29 % à être bénévoles avant leur mission. Ces volontaires orientés par des organismes d’accompagnement des jeunes réalisent davantage leurs missions dans les établissements d’aide à l’insertion ou à l’orientation (30 % des volontaires de ces établissements), dans les administrations de l’État (20 %), que dans la moyenne de toutes les autres catégories d’organismes (11 %).

Une envie de bénévolat qui ne se réalise pas toujours

Si les jeunes qui s’engagent en Service Civique donnent en moyenne un peu plus de leur temps bénévolement que les autres, cette étude cherche à évaluer s’ils s’engagent davantage après la mission. Il existe deux façons de mesurer l’effet des missions : l’approche « objective » consiste à comparer la fréquence du bénévolat avant et après la mission, et l’approche « subjective » consiste à demander au jeune si la mission a eu un effet sur son envie de faire du bénévolat.

Ces deux approches donnent des résultats divergents. Alors que 44 % des volontaires déclarent que leur mission a eu une influence positive sur leur envie de faire du bénévolat, contre 3 % qui déclarent qu’elle a eu une influence négative, l’approche objective montre une grande stabilité des fréquences de bénévolat avant et après la mission. D’après les catégories utilisées [encadré « Méthode »], 14 % des volontaires ont augmenté l’intensité de leur engagement après la mission, tandis que 17 % l’ont diminuée. Pour une majorité de volontaires (69 %), la fréquence de bénévolat est restée stable avant et après la mission, dont 22 % qui en faisaient avant et après la mission et 47 % qui n’en faisaient ni avant ni après la mission.

Les missions dans les associations favorisent plus le bénévolat que dans le secteur public

Cependant, les effets sur le bénévolat sont très variés selon le type d’organisme d’accueil, le degré d’encadrement et les conditions de la mission. L’utilisation d’une analyse statistique par régression permet d’isoler les effets de chaque variable caractérisant la mission sur l’augmentation de fréquence de l’engagement bénévole, d’une part, et sur l’influence positive sur l’envie de faire du bénévolat, d’autre part.

Il ressort de cette analyse que le type d’organisme joue un rôle significatif, tant pour donner l’envie aux jeunes de faire du bénévolat que pour en augmenter réellement la fréquence. Les associations, et notamment les associations non sportives, sont celles qui favorisent le plus l’augmentation du bénévolat, par opposition aux autres types d’organismes proposés, qui pour la plupart relevaient du secteur public. Ainsi, effectuer sa mission dans une association non sportive augmente la probabilité d’accroître son bénévolat, par rapport aux missions dans les collectivités territoriales (11 points de plus 5 ), les établissements d’enseignement (+ 9 points), les établissements d’aide à l’insertion et à l’orientation (+ 9 points), et dans une moindre mesure les établissements socioculturels, de santé et les administrations. Les mêmes résultats s’observent en ce qui concerne l’envie de faire du bénévolat, avec des effets plus élevés encore. Cependant, environ un tiers de l’effet positif sur le bénévolat des missions dans le secteur associatif s’explique par le fait que 12 % des volontaires sont restés bénévoles dans leurs structures d’accueil, ce qui n’est possible que pour le secteur associatif.

Si les volontaires sont rattachés à un organisme d’accueil, ils peuvent intervenir, à titre secondaire, dans d’autres lieux au cours de leur mission. L’intervention à titre secondaire dans une association augmente de 7 points la probabilité d’augmenter son engagement, tandis qu’intervenir dans une collectivité territoriale la diminue de 7 points. Le fait que les associations favorisent plus l’engagement que le secteur public se vérifie donc aussi dans le cas d’une intervention à titre secondaire.

Méthode

Les effets du Service Civique sur l’engagement : avantages et inconvénients des approches objective ou subjective

L’approche objective permet d’interroger les jeunes sur des éléments  factuels qui laissent moins de place à l’interprétation des répondants. Cependant, la faible part de volontaires dont la réponse a évolué est en partie liée au nombre réduit de modalités de réponse (à une période précise de l’année / quelques heures par mois / quelques heures par semaine), si bien que l’enquête ne permet de mesurer que les évolutions les plus importantes sans détecter les évolutions plus légères. Par ailleurs, les jeunes ne sont interrogés que sur leur engagement depuis la fin de la mission jusqu’au moment de l’enquête, de 6 à 18 mois après la fin des missions, ce qui exclut les potentiels effets à long terme de la mission sur le bénévolat. Les volontaires ayant terminé leur mission le plus tôt par rapport à la date de l’enquête (de 16 à 18 mois avant) ont ainsi plus de chances d’avoir augmenté leur engagement que ceux qui l’avaient terminée plus récemment (de 6 à 8 mois) : 19 % contre 13 %.

L’approche subjective permet alors de compléter l’analyse, car les volontaires qui déclarent que la mission leur a donné envie de faire du bénévolat n’ont peut-être pas ou pas encore trouvé l’occasion de matérialiser cette envie.

Ressenti des jeunes et niveau d’encadrement : des facteurs qui incitent au bénévolat

Les volontaires ont également été interrogés sur des sentiments éprouvés au cours de leur mission. Ceux-ci jouent un rôle important dans le fait d’avoir envie de faire du bénévolat : le sentiment d’être utile aux autres, la fierté du travail bien fait et l’impression de faire partie d’une équipe sont associés, comme on pouvait s’y attendre, à une plus grande envie de faire du bénévolat, tandis que le sentiment d’être exploité et l’ennui ont l’effet inverse. Par ailleurs, les volontaires qui ont déclaré s’être sentis utiles aux autres ou intégrés à une équipe « toujours » ou « souvent » ont une probabilité d’augmenter leur bénévolat de 3 points de plus par rapport à ceux qui n’ont « jamais » eu ce sentiment ou seulement « parfois ». Plus étonnant, le sentiment d’être exploité est également corrélé au fait d’augmenter sa pratique bénévole, dans les mêmes proportions, même si comme on l’a vu les personnes concernées déclarent un désir d’engagement plus faible.

L’encadrement et l’accompagnement des jeunes au cours de leur mission sont également des facteurs à prendre en compte. Les volontaires qui déclarent que leurs tuteurs leur donnaient des indications sur l’objectif de la mission en les laissant choisir la manière d’y parvenir, ont tendance à plus augmenter leur bénévolat que les volontaires qui déclarent que les tuteurs leur donnaient des indications sur ce qu’il fallait faire et comment il fallait le faire (+ 3 points). Ces volontaires ont aussi plus augmenté leur engagement par rapport à ceux qui déclarent n’avoir pas eu d’encadrants ou auxquels ceux-ci ne donnaient pas d’indications. Il semble donc qu’un encadrement présent mais qui accorde de l’autonomie aux volontaires favorise leur engagement. Clotilde Talleu (2019) montrait également l’existence d’un lien entre l’autonomie laissée aux jeunes et le sentiment d’être utile.

Les rencontres avec des personnes d’un autre milieu social lors de leur mission favorisent l’engagement des volontaires : ceux qui déclarent avoir fait de telles rencontres sont plus nombreux à avoir envie de faire du bénévolat et à augmenter leur engagement bénévole réel. L’effet sur le bénévolat est plus grand lorsque les volontaires déclarent avoir rencontré des personnes d’un milieu moins favorisé que le leur.

Les éléments liés au contrat de volontariat ne semblent pas avoir beaucoup d’influence : la durée hebdomadaire et la durée globale de la mission ne sont pas corrélées avec l’engagement. Cependant, lorsque la mission est rompue à cause d’un abandon du poste, d’un cas de force majeure, ou d’une embauche du volontaire, la probabilité d’être plus engagé après la mission diminue.

La situation du volontaire 6 mois après la mission a peu d’effet sur l’augmentation de l’engagement. Seuls les volontaires en attente de reprise d’études sont plus engagés après la mission (+ 4 points) et ont plus envie de faire du bénévolat. En revanche, le fait d’être en emploi ou en recherche d’emploi a un effet négatif sur l’envie de faire du bénévolat. Ces résultats montrent que les volontaires dans une situation qui laisse du temps pour l’engagement bénévole sont plus à même de s’engager après leur mission.

Le type de mission sans effets sur la diminution de l’engagement

Symétriquement, nous avons cherché quels types de missions étaient les plus susceptibles de détourner de l’engagement bénévole les jeunes engagés avant leur mission. Les missions qui ont été rompues pour « faute grave » ou « cas de force majeure » sont plus souvent suivies d’une baisse de l’engagement (respectivement 36 points et 32 points de plus par rapport à des missions non rompues). Les volontaires ayant été accompagnés par des membres de la structure, et ceux qui ont fait leur mission dans le domaine du sport, diminuent moins souvent leur bénévolat. Hormis ces éléments, peu de variables relatives à la mission de Service Civique sont corrélées à cette baisse, ce qui signifie que la part des jeunes qui diminuent leur engagement est sensiblement la même quel que soit le type de mission. Par contre, certains éléments du profil des volontaires influencent cette probabilité de baisse, tandis que ces variables avaient peu d’influence sur la hausse : les volontaires les plus âgés, les hommes, ainsi que ceux dont les parents sont également engagés, ont moins de chances de réduire leur bénévolat. Les volontaires qui ont changé de commune de résidence entre le début de leur mission et la date de l’enquête ont en revanche plus de chances de diminuer leur pratique bénévole (+ 11 points).

1. Dans cet article, le mot volontaire désigne les volontaires de Service Civique, à distinguer du bénévolat.
2. Le secteur associatif comprend les associations et fédérations y compris sportives, à l’exclusion des autres catégories du tableau 1.
3. Source : Baromètre DJEPVA sur la jeunesse 2018, calculs des auteurs
4. Source : Insee-Drees, Enquête nationale sur les ressources des jeunes, calculs des auteurs.
5. Il s’agit d’effets marginaux moyens d’une régression logistique, exprimés en points de pourcentage. Le tableau de résultats est disponible en données complémentaires sur www.injep.fr

Sources bibliographiques

Becquet V., « L’expérience du service civil volontaire à Unis-Cité : quels enseignements pour le service civique ? », Les Cahiers de l’action n° 34, INJEP, 2011.
Brice-Mansencal L., Datsenko R., Guisse N., Hoibian S., Lautié S., « Baromètre DJEPVA sur la jeunesse 2018 », INJEP notes et rapports, 2018.
David A., « Le service civique en chiffres ». Fiches repères n° 41, INJEP, septembre 2020.
Francou Q., Ploux-Chillès A., « Les volontaires en Service Civique : des parcours de formation et d’insertion variés », INJEP, Analyses & synthèses n° 32, mars 2020.
Talleu C., « Le service civique dans les associations : Mise en œuvre et impact dans le département de l’Aisne », INJEP notes et rapports, 2019.
• INJEP, L’enquête Service Civique 2019, Fiches sources, www.injep.fr