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Éducation populaire à l’ère du numérique


Ce rapport s’appuie sur une démarche de recherche documentaire, d’entretiens et d’observation. Il pose la première pierre d’un questionnement plus large sur les mutations des pratiques et du système d’acteurs de l’éducation populaire, en évoquant par touches successives quelques aspects de la relation entre éducation populaire et numérique (histoire, pratiques, acteurs, principes, etc.).



La relation entre éducation populaire et numérique est complexe. Les pratiques numériques, quand bien même elles sont collectives, ne participent pas toutes de l’éducation populaire. Toutes les pratiques d’éducation populaire usant du numérique ne constituent pas plus une contribution à un projet d’émancipation systématique. L’idée défendue ici revient à dire qu’il existe néanmoins un continuum d’enjeux entre culture, émancipation et technique, dans certaines pratiques développées (hier et aujourd’hui) au sein des réseaux d’éducation populaire et dans certaines pratiques numériques poussées par des collectifs militants tournés vers l’action.

Apprendre en faisant est à coup sûr une pratique commune aux acteurs de l’éducation aux médias, de la médiation numérique, de la culture scientifique et technique ou de l’animation socioculturelle. Mais ce sont aujourd’hui les référentiels, qui permettent de doter la pratique d’objectifs émancipateurs, qui semblent s’être transformés. Si les acteurs de l’éducation populaire dans leur ensemble font moins référence à des penseurs ou débats pédagogiques, ils multiplient en revanche les références à la société de la connaissance dans laquelle l’horizon des communs et les valeurs de la culture du Libre jouent un rôle important pour renforcer les liens entre l’action éducative et les grands enjeux politiques de la société numérique (données, partage, information, etc.).

Cela incite à considérer le rapport entre éducation populaire et numérique non comme une catégorie nouvelle de l’activité du secteur, mais comme une configuration nouvelle pour les acteurs qui cherchent, à des titres divers (en tant que militant, animateur, enseignant, médiateur, etc.), à contribuer à une action collective appuyée sur des communautés plurielles plaçant l’expression de la citoyenneté au croisement de l’esprit critique et de la construction collective. L’éducation populaire « au » ou « par » le numérique semble n’avoir de sens que dans une dynamique adossant la pratique technique à des enjeux sociétaux plus larges qui positionnent l’expérience de la citoyenneté.

Emmanuel PORTE, chargé d’études et de recherche INJEP